FRERE Elie, je me souviens de toi

Je me souviens encore de toi
Je me souviens de toi lorsque, par l’entremise de monsieur Touré Jules, tu as décidé en 2006 de m’accueillir chez toi à ton appartement à Nanterre pendant mon stage postdoctoral.
Je me souviens de tous les efforts que tu as menés pour m’obtenir, en un temps record, tous les documents administratifs exigés à cet effet, pour me permettre d’être à la date indiquée, au laboratoire d’ethnomusicologie du Musée de l’Homme pour le début effectif de mon stage.
Je me souviens de tes nuits blanches pour finaliser la rédaction de ta thèse en arts plastiques, sous la pression de ton directeur madame E. Chiron et que tu finiras par soutenir en novembre en septembre 2007.
Je me souviens de ce qu’au lendemain de cette soutenance, toi, ton épouse Anna et moi avions entamé un débat sur la nécessité pour toi de renter au pays pour enseigner à l’Université où les enseignants en arts plastiques sont presqu’inexistants.
Je me souviens de ce qu’après avoir évalué tous les contours de ma proposition et, sous le regard bienveillant de ta brillante épouse, tu décidas de constituer ton dossier de candidature au poste de recrutement à l’Université d’Abidjan-Cocody.
Je me souviens de ce qu’à l’occasion d’un de mes voyages à Paris, tu m’as confié ce dossier de candidature pour le remettre en mains propres aux autorités universitaires.
Je me souviens de ce qu’après avoir remis un exemplaire de ton dossier au doyen de notre UFR, celui-ci, très enthousiasmé, l’a soumis aussitôt au conseil de l’UFR qui, comme il fallait s’y attendre l’a adopté et transmis à la commission de recrutement.
Je me souviens de ce qu’à peine la décision de recrutement t’a été notifiée en 2008, sans attendre tu as pris ta valise et tes livres pour débarquer à Abidjan, alors que ton pays était en pleine crise sociopolitique, tellement tu avais hâte de contribuer à la formation de tes frères et sœurs qui ont besoin de savoirs relevant de tes compétences.
Je souviens de tous les projets que tu as commencé à mettre en place avec tes étudiants, parce que tu voulais mettre ton expérience à leur profit.
Je me souviens de ce que conformément à tes ambitions et surtout à ton souci d’efficacité et, pour répondre à certaines exigences académiques, tu as décidé de postuler au CAMES pour le grade de maître assistant.
Je me souviens de ce qu’alors que tu étais à Paris, tu as pris un avion pour venir en terre d’Eburnie pour monter ton dossier en janvier 2012, le déposer et retourner vaquer à tes activités d’exposition, en attendant de revenir à la rentrée universitaire.
Je me souviens de ce que juste quelques temps après ton retour à Paris, j’avais du mal à échanger avec toi par mail, comme on en avait l’habitude.
Je me souviens du jour où ayant repris la communication avec toi, tu m’as informé que tu as été malade pendant un bon moment et que tu te remettais peu à peu.
Je me souviens de ce que c’est au cours de ces échanges que je t’ai informé de ton admission au CAMES et que tu m’as promis rentrer dès que ta santé s’améliorera.
Je me souviens du jour où, de ton chevet d’hôpital, Anna m’a appelé et t’a passé le téléphone pour que je communique avec toi. Mais t’entendant à peine, j’ai demandé à Anna de reprendre le téléphone.
Je me souviens de ce que sans avoir perdu espoir, c’est ce jour que j’ai compris que tu luttais contre ce Goliath devant qui l’exploit de David ne peut être reproduit.
Mais je continuais d’espérer en ta réussite devant ce monstre, jusqu’à ce jour chaotique où on m’annonce ton départ d’ici-bas en janvier 2013.
Elie, mon frère, je me souviendrai encore et encore de toi, car je sais que de là où tu te trouves tu penses à tous tes proches parents, amis, collègues et étudiants que tu as laissés, car ta mission sur terre est comme une symphonie inachevée.
A Dieu, frère Elie

Dr HIEN Sié
Musicologue enseignant chercheur
Université de Cocody-Abidjan